Délibération ce matin dans un lycée du Val-de-Marne, pour des candidats de la prestigieuse série S. La présidente, une universitaire de Paris VI, nous explique de façon liminaire que dans ce jury, les candidats ont obtenu 25 points de moins que la moyenne académique, et qu'il faudra par conséquent les leur rajouter, à tous (je n'ai pas la présence d'esprit de demander si des consignes inverses ont été données aux jurys trop généreux). Vus les coefficients cela signifie un point de plus en maths, et en physique-chimie, et en SVT, et en LV1. Je me penche vers mon voisin matheux : "Mais vous n'avez pas déjà donné un bon coup de pouce aux candidats ? -Si, on a noté sur 24", me répond-il placidement. Pour les candidats à qui il manquerait un peu plus de 25 points, on ne doit pas s'interdire de faire preuve d'indulgence, il faut regarder le dossier scolaire, valoriser les compétences. Dans un dossier, un collègue malicieux ou bienveillant a écrit, au sujet de l'un de ses élèves, "Est venu à presque tous les cours cette année", et je ne parviens pas à déterminer la dose d'ironie que contient cette appréciation laconique.
La salle est d'abord rétive à cette opération d'hélitreuillage des résultats, mais juillet aidant on finit par se laisser aller. Quand la présidente annonce au sujet d'un candidat arrivé à 9,37 de moyenne, "En automatique c'est bon, il est admis", on ricane d'abord, on dit "C'est les soldes d'été !" ou "Offert par le rectorat !", mais au centième candidat on ne dit plus rien, on se contente de tamponner au rouge les copies amendées. Je sors de ma torpeur en voyant passer au vidéoprojecteur un candidat qui a obtenu 3 en maths, 8 en physique et 9 en SVT, mais qui a tout de même décroché son baccalauréat scientifique (sans même avoir besoin de passer par l'oral !) grâce à ses heureuses dispositions dans les autres matières. Nanti du diplôme délivré par notre indulgence, "premier grade de l'enseignement supérieur" comme nous l'a rappelé la présidente, ce jeune homme entame fort joliment ses études. Sic itur ad astra !
Demain, les candidats admis trépigneront de joie devant leurs noms inscrits au tableau. Leur famille les félicitera. Le ministère sera content. Moi...